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 Pierre Bentata et les Désillusions de la liberté !

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Pierre Bentata et les Désillusions de la liberté !

Pour la sortie de son deuxième livre « Les désillusions de la liberté » aux Éditions de l’Observatoire, Pierre Bentata, enseignant-checheur, revient sur les objectifs et les enjeux de son ouvrage. Pierre nous offre quelques détails sur ce projet qui lui tient tant à coeur. 

« Les désillusions de la liberté » : suite logique du premier livre : « Des jeunes sans histoire » ?

Tout à fait ! Mon premier livre tentait de comprendre le pessimisme et le malaise des jeunes européens. J’y expliquais que les jeunes souffraient de la perte d’un objectif historique commun, d’un projet de société à construire, qui était symptomatique de la fin de l’histoire. En naissant dans des sociétés matures, aux contours déjà bien définis et où il est évident que la démocratie et le marché représente un système politique, économique et social indépassable, les jeunes se retrouvent d’une certaine manière privé de grands projets, de grandes aspirations qui ont façonné la vie de leurs parents et celles des jeunes vivant dans des sociétés encore en construction.

Mais plus j’y réfléchissais, plus je m’apercevais que ma thèse était fortement mise à mal par de nombreux événements politiques. En effet, la montée du nationalisme qui se traduit par une volonté de repli politique, économique et même ethnique semble contredire cette thèse. Tout comme le retour du religieux, et plus particulièrement du fondamentalisme, qui veut remplacer la démocratie par une forme de théocratie. Et pire encore, dans le même temps émerge une nouvelle philosophie, le transhumanisme, qui propose rien de moins qu’un dépassement de l’homme à travers son hybridation avec la machine. Il n’y aurait donc pas de fin de l’histoire, bien au contraire, celle-ci marquerait même un retour en force!

Quel est l’objectif de ce deuxième livre ?

C’est cette contradiction apparente qui m’a poussé à écrire un second livre. Et je l’admets avec grand plaisir, mes réflexions n’auraient pas avancé si je n’avais pas eu autant de discussions avec mes élèves. Comme toujours, ils sont le terreau fertile de mes recherches.

Pour répondre à la question, l’objectif est donc simple, il s’agit pour moi de comprendre pourquoi le nationalisme et le fondamentalisme retrouvent une telle popularité au moment même où la philosophie transhumaniste s’éveille. Ce qui m’intéressait particulièrement était de comprendre les ressorts d’un développement simultané de ces trois pensées ou conceptions du monde; et je crois que pour y parvenir, il faut revenir à la philosophie des Lumières et à sa conception de l’Homme, au lien qui existe entre l’Homme et la société, et surtout à la place qu’accordaient les Lumières à la notion de liberté. Pour résumer très rapidement, je crois que nous vivons dans un monde qui découle totalement de la philosophie des Lumières – un monde fondé sur l’universalisme, la liberté individuelle et la Raison – et qu’en conséquence, toutes les imperfections de ce monde pousse une part croissante de la population à rechercher dans les critiques des Lumières – souvent nationalistes et religieux – un modèle alternatif à celui dans lequel de vivons. C’est pour cela que je parle de désillusions de la liberté.

Comment s’est-il construit ? 

Comme je le disais, ce livre n’aurait pas vu le jour sans les nombreuses discussions et débats qui ont lieu durant mes cours. J’aime croire que mes cours sont une Agora, un lieu d’échanges où je l’espère, mes étudiants apprennent autant que moi. En confrontant les réflexions de mes étudiants aux événements politiques récents, qu’on pense aux résultats des partis nationalistes dans toute l’Europe, aux nouvelles querelles religieuses ou encore aux déclarations des grands promoteurs du transhumanistes qui dirigent les grandes entreprises de la Silicon Valley, l’idée de ce livre s’est imposée naturellement à moi.

Le livre parle de « l’affaiblissement des nations et une perte de liberté individuelle. » Sur quoi ce base ces points et qu’est ce qui pourrait y remédier ?

En effet, la globalisation – que je tiens pour conséquence inévitable et enviable des Lumières – a provoqué un affaiblissement des Etats. On le voit chaque jour. Les Etats ne sont plus en mesure d’agir de façon indépendante pour remplir les fonctions qui leur assurent pourtant leur légitimité. Ainsi, la lutte contre le chômage et contre la pauvreté, la mise en place de politique économique, la protection de l’environnement, le contrôle des frontières, la maîtrise des marchés financiers pour ne citer que quelques-uns sont autant de domaines dans lesquels un Etat ne peut agir seul, indépendamment de ce que font les autres. Cette interdépendance, qui résulte de la globalisation, marque un affaiblissement des Etats et de leur souveraineté. Et dans le même temps, il naît un sentiment de perte d’autonomie individuelle, car la globalisation rend chacun de nous dépendant de tous les autres habitants de la planète. Cette union des hommes et des femmes a du bon, c’est indéniable, mais dans le même temps, elle peut sembler angoissante car plus personne ne maîtrise totalement son destin. Nous avons le sentiment d’être tous engagés dans le même bateau mais aussi d’être interchangeables. A trop nous ressembler, nous avons l’impression de ne plus vraiment avoir d’identité, de spécificité. Et tout cela provient selon moi d’une philosophie, d’une conception du monde qui est née des Lumières, s’est ancrée profondément en nous, mais ne s’est révélée qu’une fois le processus de globalisation pleinement engagé.

Un 3e livre en préparation ? 

Bien sûr ! Je ne vais pas m’arrêter en si bon chemin ! Mon troisième livre tentera d’approfondir la question du lien entre les citoyens et leur Nation. Si vous lisez deux livres, vous verrez que cette question s’impose d’elle-même. Il me semble que la Nation représente aujourd’hui le dernier symbole d’une communauté, d’une culture, d’une histoire réelle ou fantasmée spécifique à un groupe particulier.Je vais donc essayer de comprendre le rôle symbolique, transcendant, d’une Nation afin de comprendre les conséquences de leur affaiblissement sur leurs citoyens. D’une certaine manière, il s’agira d’approfondir l’idée selon laquelle la Nation joue un rôle presque religieux dans nos sociétés laïques, d’en comprendre les mécanismes et d’en déduire les risques pour l’avenir. Tout un programme !

Vivement la suite !

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